Bonne nouvelle pour tous ceux que les orages ont frappé hier encore : en 2008, le nouveau supercalculateur de Météo-France prévoira les phénomènes météorologiques locaux à 2,4 km près.
Nettement moins poétique que la grenouille au pied de son échelle, Arome, le supercalculateur inauguré au centre météorologique de Toulouse, a tout du sumo informatique. Attention vertige, cet ordinateur aux cartes numériques musclées effectue 9 millions de millions d'opérations à la seconde. « Il est quatre fois plus puissant que son prédécesseur, Aladin », indique Alain Beuraud du centre de Toulouse. Cette méga-puissance va lui permettre d'affiner très sérieusement les prévisions météo.
« Jusqu'à présent nous arrivions à travailler sur un maillage de dix kilomètres. Avec Arome, nous allons améliorer notre performance à 2,4 kilomètres », poursuit le météorologue. « Concrètement, nous pourrons prévoir des phénomènes qui nous échappent actuellement. Nous serons capables d'alerter les zones les plus sensibles sur l'arrivée d'une perturbation localisée. » Les résultats d'Arome seront intéressants dans des applications très diverses : orages, inondations, brouillard, pollution, montagne, éolien, météo côtière... et même les îlots de chaleur urbains en cas de canicule.
Ce supercalculateur, aux trente-deux armoires informatiques dotées de huit processeurs chacune, ne peut toutefois pas se passer de l'homme. Pour entrer les données recueillies dans l'atmosphère mais surtout pour interpréter ses résultats. « C'est le travail du prévisionniste. » Il va aussi permettre de nouveaux progrès dans le domaine de la connaissance du changement climatique. Grâce, notamment, « à l'amélioration de la représentation des nuages et des surfaces continentales. Aussi, avec la simulation interactive du gaz carbonique et des aérosols atmosphériques (particules de suie, de sulfates...). L'évolution de l'ozone stratosphérique sera également prise en compte. »
Au delà des simulations climatiques sur le globe, Météo-France va accentuer ses efforts sur l'étude du changement climatique à l'échelle régionale. « Des scénarios régionalisés sont indispensables pour évaluer les impacts du changement prévu sur les événements météorologiques extrêmes et sur de nombreux secteurs tels que les ressources en eau, l'agriculture, les écosystèmes, l'énergie, la santé et le tourisme. »
Le nouveau bébé de Météo-France n'est pas encore sevré que les chercheurs planchent déjà sur son successeur. « Vers 2015, nous devrions être en mesure de fournir des prévisions pour un maillage inférieur au kilomètre. » Est-il nécessaire d'être aussi précis, étant donné le coût élevé que cela implique ? « Pour certains sites, comme les aéroports, tout à fait », défend Alain Beuraud. « Plus nous serons précis, plus l'économie réalisée sera importante. On estime aujourd'hui que pour 1 € investi dans les prévisions météorologiques, on évite 10 € de dégâts. Sans oublier les vies sauvées, qui, elles, n'ont pas de prix. » Le coût du supercalculateur, lui, s'élève à 3,8 millions d'euros par an pendant cinq ans.
Jean-Pierre BUISSON.